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Vote par correspondance des détenus : une circulaire publiée

Pénal - Peines et droit pénitentiaire
02/03/2022
Le Ministère de la Justice a diffusé une circulaire sur les modalités d’inscription sur les listes électorales et d’exercice du droit de vote des personnes détenues.
Le directeur de l’administration pénitentiaire, Laurent Ridel, rappelle : « Historiquement, les personnes détenues ne pouvaient exercer leur droit de vote que selon deux modalités et leur participation électorale était faible : l'obtention d'une permission de sortir pour voter à l'urne ou la procuration électorale ». En 2019, une troisième modalité a été expérimentée : le vote par correspondance dans les établissements pénitentiaires.
 
L’article 112 de la loi du 27 décembre 2019 relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique (L. n° 2019-1461, 27 déc. 2019, JO 28 déc., v. Engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique : la loi publiée, Actualités du droit, 7 janv. 2020) a alors prévu que :
- les personnes détenues sont systématiquement inscrites sur une liste électorale en application d'une procédure dérogatoire, de même que les mineurs écroués atteignant l'âge légal de la majorité en détention ;
- le vote par correspondance au sein des établissements pénitentiaires s'ajoute aux deux modalités de vote traditionnelles.
 
Deux décrets sont ensuite venus préciser les modalités d’application de la loi (D. n° 2020-1460, 27 nov. 2020, JO 29 nov., v. Vote par correspondance des personnes détenues : le décret d’application publié, Actualités du droit, 1er déc. 2021 et D. n° 2021-1501, 18 nov. 2021, JO 19 nov.)  
 
La circulaire, en date du 18 février 2022, définit l'organisation à mettre en place au sein de l'administration pénitentiaire et explicite les procédures à suivre pour l'inscription des personnes détenues sur les listes électorales et l'exercice effectif de leur droit de vote.
 
Quelle organisation interne de l’administration pénitentiaire ?
Ladite circulaire liste les différentes personnes en charge des missions relatives au droit de vote des personnes détenues. Concrètement :
- au niveau de la direction de l’administration pénitentiaire : un référent national chargé de la citoyenneté a pour mission d'assurer la mise en œuvre de ces dispositifs, son action étant relayée au niveau local par des référents désignés dans chaque direction interrégionale des services pénitentiaires ;
- dans chaque direction interrégionale des services pénitentiaires : le directeur interrégional adjoint, est nommé référent pour le vote des personnes détenues ;
- au niveau des établissements pénitentiaires et des services pénitentiaires d'insertion et de probation : le chef d'établissement est le garant du bon déroulé de l'ensemble des missions relatives au droit de vote des personnes détenues (il peut déléguer sa signature et peut être assisté) ; en outre un binôme référent « citoyenneté », constitué d'un personnel de direction ou d'un membre du corps de commandement de l'établissement pénitentiaire et d'un directeur pénitentiaire d'insertion et de probation du SPIP est désigné.
 
Pour mettre en œuvre ces différents dispositifs pour l'exercice du droit de vote des personnes détenues, une fiche opérationnelle détaillant chaque étape est diffusée en annexe de la circulaire. En outre des astreintes seront organisées lors de la période électorale en administration centrale, en direction interrégionale et en établissement pénitentiaire. Des documents viennent également rappeler les différentes procédures à suivre.
 
La circulaire précise enfin qu’un onglet « situation électorale » est disponible sur Genesis. Il doit être renseigné par les référents citoyenneté et leurs équipes à chaque étape du processus.
 
Inscription sur les listes électorales
Les dispositions visant l'inscription sur les listes électorales et le vote par correspondance concernent l'ensemble des personnes détenues au sens de l'article D. 50 du Code de procédure pénale ; à savoir « les personnes faisant l'objet d'une mesure privative de liberté hébergées au sein d'un établissement pénitentiaire, qu'elles soient prévenues ou condamnées ». Elles peuvent alors exercer leur droit de vote selon trois modalités : la permission de sortir pour voter à l'urne, la procuration électorale et le vote par correspondance.
 
La personne détenue se voit informer à deux reprises des modalités d’exercice de son droit de vote : lors du parcours arrivant, grâce à une note explicative, et au moins 3 mois avant chaque scrutin par un formulaire d’inscription sur liste électorale remise contre signature qui permet ainsi de recueillir son souhait de s'inscrire sur une liste électorale et, à titre indicatif, la commune dans laquelle elle souhaite s'inscrire et la modalité de vote qu'elle souhaite mettre en œuvre.
 
Lorsqu'une personne détenue a indiqué qu'elle souhaitait s'inscrire sur une liste électorale aux termes de son formulaire d'inscription, elle est inscrite en application d'une procédure dérogatoire spécialement élaborée pour les personnes détenues. Plusieurs étapes :
- l’administration pénitentiaire doit vérifier l’identité de la personne détenue ;
- les documents permettant de former une demande d’inscription sur liste électorale doivent être remis ;
- les référents citoyenneté doivent rassembler les demandes d’inscription sur les listes électorales et vérifier leur caractère complet.
 
La demande d’inscription est ensuite transmise à la mairie de la commune concernée par le chef d’établissement pénitentiaire dans un délai de dix jours à compter de son dépôt, au plus tard le sixième vendredi précédant le scrutin. Le maire dispose ensuite de cinq jours pour accepter ou refuser la demande. En cas de refus, la personne détenue peut former un recours contre la décision.
 
Les différentes modalités de vote des personnes détenues
Permission de sortir - Les personnes détenues condamnées à une peine privative de liberté inférieure ou égale à cinq ans, ou à une peine privative de liberté supérieure à cinq ans lorsque ces dernières ont exécuté la moitié de leur peine, peuvent demander une permission de sortir d'une journée pour l'exercice de leur droit de vote. Les documents permettant de justifier de son identité doivent lui être remis.
 
Procuration électorale - Les personnes placées en détention provisoire et celles détenues purgeant une peine et n'étant pas frappées d'une incapacité électorale à la suite d'une décision de justice peuvent exercer, sur leur demande, leur droit de vote par procuration. Le mandant peut alors établir une procuration, en remplissant le formulaire, au profit d’un mandataire en milieu libre devant jouir de ses droits électoraux et être inscrit sur une liste électorale.
 
Vote par correspondance sous pli fermé – Peuvent voter par correspondance les mêmes personnes incarcérées que celles mentionnées pour l'inscription sur liste électorale. Précision : sont concernées les personnes détenues inscrites sur les listes électorales de la commune du département d'implantation de l'établissement pénitentiaire, soit la commune où se situe la préfecture de département de l'établissement.
 
Dans le cadre d'une élection présidentielle, un dispositif de vote par correspondance centralisé est mis en place : l'ensemble des bulletins de vote par correspondance est acheminé puis dépouillé dans un bureau de vote unique situé au ministère de la Justice à Vendôme. Ainsi, le bureau de vote unique implique l'édition d'une liste nationale des électeurs optants et des admis au vote par correspondance.
 
Pour éditer cette liste, les référents citoyenneté distribuent aux personnes détenues un formulaire d'option qui doit notamment préciser que la personne optant pour le vote par correspondance ne pourra revenir sur son choix. Les personnes détenues concernées reçoivent alors la propagande électorale directement à l’établissement pénitentiaire.
 
La circulaire rappelle : les opérations de recueil des votes doivent se tenir dans les établissements pénitentiaires la semaine précédant le scrutin et au plus tard le samedi précédant un scrutin. À noter que « la ou les salles de recueil des votes doivent être suffisamment grandes, accessibles et fonctionnelles pour permettre aux personnes détenues d'exprimer leur choix dans des conditions permettant de garantir la confidentialité du vote et la sincérité du scrutin ».
 
Lorsque tous les électeurs par correspondance ont remis leur vote et que les opérations de recueil des votes sont terminées, le chef d'établissement ou ses délégataires établissent un procès-verbal indiquant le nombre d'électeurs de l'établissement admis à voter par correspondance et le nombre d'électeurs ayant effectivement pris part au vote. Il verse ensuite dans l’enveloppe l'extrait de la liste des électeurs admis à voter par correspondance, la liste d'émargement et le procès-verbal des opérations de vote en double exemplaire, les enveloppes d'identification scellées par les électeurs contenant les enveloppes de vote contenant elles-mêmes les bulletins de vote. La ou les enveloppes confidentielles sont scellées afin de garantir leur inviolabilité. Elles sont ensuite remises, pour une élection présidentielle, au transporteur chargé de les acheminer au bureau de vote unique. Pour les élections hors élection présidentielle, le chef de l’établissement ou son délégataire ont la responsabilité de les remettre au président du bureau de vote de la commune où se situe la préfecture de l'établissement pénitentiaire le jour du scrutin à l'extérieur et à l'ouverture du bureau de vote.
 
« Je compte sur votre totale mobilisation pour mettre en œuvre ces nouvelles modalités de vote offertes aux personnes détenues qui participent de l'amélioration de la citoyenneté en prison » conclut le directeur de l’administration pénitentiaire.
Source : Actualités du droit